Oui, nous devrions avoir peur !

Il y a quelques semaines, un haut fonctionnaire de l’état déclarait qu’Haïti était le pays de la région à avoir été le plus affecté par les ouragans au cours des dernières années.  Naturellement ce cadre de l’administration liait cet état de fait aux changements climatiques. Ces affirmations qui ne reposent sur aucune base scientifique, mais qui apportent bien sûr de l’eau au moulin de ceux qui prétendent que tous phénomènes météorologiques extrêmes sont causés par les changements climatiques. Rassurez-vous nous ne détenons pas la palme de l’ignorance, car beaucoup de dirigeant de ce monde surf sur la vague climatique. Mais qu’en est-il vraiment ? Notre pays est-il réellement depuis quelques temps la cible favorite des ouragans ? Y a-t-il une corrélation entre le CO2 et les frappes cycloniques sur la région, ou existe-t-il d’autres mécanismes de forçage créant des conditions favorables aux impacts sur notre pays ?

Considérons la période 1996-2016 sur l’ensemble des caraïbes et de l’Amérique Centrale qu’observez-vous ?

L’Ouest de Cuba, le Sud-est des Antilles, le Nord-est des Antilles, les îles Turques et Caicos, la Jamaique ont été largement plus affectés par notre pays et par plusieurs cyclones de forte intensité. La République d’Haïti n’a été affectée que par un seul cyclone majeur (Mathieu) et un mineur (Gustave en 2008). Précisons que nous parlons ici de frappe directe. Certes, il y a eu des perturbations de fortes intensités qui sont passées relativement près de nos côtes, comme Sandy 2012 ou Thomas 2010, mais pour cette mise au point nous ne tenons compte ici que des frappes directes (l’œil doit être totalement sur notre territoire).

Pourtant nous n’avons pas toujours aussi était chanceux, si l’on considère par exemple la fin du 19e siècle ou la période 1949-1969 période au cours de laquelle la concentration de CO2 était beaucoup moins importante.

La concentration de CO2 en PPM

Existerait-il une corrélation entre l’augmentation de sa concentration dans l’atmosphère et la fréquence des frappes sur notre région ? Notre pays étant relativement petits, nous nous servirons d’un vaste territoire comme les USA qui possède plus d’une dizaine de milliers de kilomètres exposée aux frappes cycloniques (Golfe du Mexique, Floride, Cotes Est).

La courbe noire indique la concentration de CO2, en bleu les frappes directes sur les USA et en rouge les ouragans majeurs ayant affecté ce pays.

Comme vous pouvez le constatez, malgré l’augmentation du CO2 dans l’atmosphère, le nombre d’ouragans touchant les États-Unis d’Amérique n’a pas augmenté au cours des dernières décennies, alors que le nombre d’ouragans majeurs affectant ce pays a au contraire diminué.

En effet, sur le graphique ci-dessous notez que les périodes entre les atterrissages d’ouragans majeurs sur les USA s’allongent contrairement aux années 50 ou 60 par exemple tout comme Haïti.

Le nombre d’années entre les atterrissages d’ouragans majeurs sur les USA a cru

Le CO2 n’est de toute évidence pas responsable de l’alternance de ces périodes actives et inactives sur notre région. Le principal serait plutôt l’Oscillation Multi décennale de l’Atlantique ou AMO.

      L’activité cyclonique sur  l’atlantique est liée aux phase de l’AMO

L’AMO (L’Oscillation Multi-décennale de l’Atlantique)

L’AMO est une variation cyclique à grande échelle dans le courant atmosphérique et océanique dans l’Océan Atlantique du Nord. Cette variation fait augmenter et baisser alternativement la température de la surface de l’océan Atlantique sur une échelle de 50 à 70 ans.

Phase positive (2005) / phase négative 2009

Des anomalies positives durant environ 40 années sont suivies d’anomalies négatives pendant environ 20 années avec une différence de températures de l’ordre de 0,6°C entre les extrêmes. La longueur du cycle est d’environ 62 ans avec des maxima autour des années 1878, 1943 et 2004, et des minima autour des années 1912 et 1974. Comment l’AMO influence-t-il le cycle des ouragans sur notre bassin ?

En général, les conditions océaniques et atmosphériques dans l’océan Atlantique sont marginalement favorables pour le développement des cyclones tropicaux. Par conséquent, si sur une échelle océanique / climatique, les températures de surface de la mer (TSM) augmentent légèrement et que le cisaillement du vent diminue légèrement, plus de tempêtes surviennent en moyenne. Il s’avère qu’un AMO plus fort (positif) mène à des TSMs plus élevées et à un cisaillement du vent plus faible et, par conséquent, favorise des cyclones plus tropicaux dans l’Atlantique.

Examinons d’abord les TSMs

Comme le montre cette série chronologique, un AMO (+) est en corrélation avec des TSM plus élevées, et vice versa. Cela se produit parce qu’un AMO positif signifie que des courants de surface plus forts apportant de l’eau chaude (et donc des TSM plus élevées)  des latitudes faibles aux hautes latitudes. Ainsi, l’AMO bascule environ tous les 50 ans entre les phases positives (favorables aux ouragans) et négatives. On pense que cela contribue à une périodicité similaire dans l’activité des cyclones tropicaux sur le bassin atlantique.

Cisaillement du vent

La deuxième raison pour laquelle un AMO (+)  favorise davantage des cyclones tropicaux concerne le cisaillement du vent. Lorsque cette oscillation est forte, les vents d’Ouest des latitudes moyennes sont plus faibles, ce qui entraîne un cisaillement du vent vertical inférieur sur l’Atlantique tropical. Pourquoi ?

Effet du cisaillement sur les cyclones tropicaux

Comme le montre ce graphique, les tropiques reçoivent la plus grande quantité d’insolation solaire par an, avec plus d’énergie venant de l’espace que celle qui est rayonnée. La circulation océanique et atmosphérique déplace ce surplus d’énergie des tropiques vers les régions plus froides du globe.

Insolation annuelle moyenne annuelle

Les courants de l’océan Atlantique transportent entre 1/4 et 1/3 du flux thermique de l’hémisphère Nord. Ainsi, lorsque l’AMO est fort, l’océan transporte plus de chaleur et l’atmosphère transporte donc moins de chaleur que la normale.

Dans l’atmosphère, les cyclones des latitudes moyennes (différents des cyclones tropicaux) sont le principal mécanisme de transport thermique. L’image ci-dessous montre la circulation autour d’un cyclone des latitudes moyennes, les vents du Sud avant le cyclone déplacent l’air chaud vers le Nord et les vents du Nord derrière le cyclone déplacent l’air froid vers le Sud.

Ce sont également ces cyclones de latitudes moyennes qui génèrent les vents de l’Ouest au-dessus de ces régions (Westerlies). Si les cyclones de latitude moyenne sont plus faibles que la normale, ces vents d’Ouest sont également plus faibles.

Ainsi, un AMO intense favorise des cyclones plus faibles sur les régions tempérées, et par conséquent à des vents d’Ouest inférieurs à ces latitudes. Ceci diminue le cisaillement du vent dans les tropiques, ce qui fournit un environnement plus favorable au développement des cyclones tropicaux.

Maintenant comparez l’activité cyclonique sur notre pays au cours des différentes phases de l’AMO ?

                                    Phase chaude ( Active )

                                          1851 – 1899

Phase inactive ( froide )

1900 – 1924

Phase active

1926 – 1965

Phase inactive

1966 – 1994

                                                           Phase active                                                            1995 – 2015

Avez-vous remarqué que la fréquence des ouragans sur notre pays était beaucoup plus élevée sur la deuxième partie des périodes de la phase active de  l’AMO ? Plus de 10 frappes entre 1875 et 1899 sur un total de de 17 frappes directes pour la période AMO + ( 1851 – 1899)

6 sur les dix dernières années (1955 – 1965 ) sur total de 9 entre ( 1925 – 1965)

Alors que lors des périodes dites inactives AMO -, une majorité de frappes s’est produite au cours du début de ces périodes (6 entre 1900 et 1910 et 5 entre 1966 et 1980 ).

                                                                1900 – 1910

                                                           1966 – 1994

La corrélation semble assez forte n’est-ce pas ?

En conclusion

Vous comprenez que le risque est beaucoup plus important lors de la deuxième partie de phase active que la première partie des épisodes froid. Ce qui est inquiétant est le relatif faible nombre d’impact direct au cours de la première partie du cycle AMO+ en cours (4). En claire, les 10 à 15 prochaines pourraient se révéler extrêmement dangereuses pour notre territoire puisque nous nous trouvons en fin de cycle l’AMO qui devrait selon toute probabilité prendre fin d’ici 5 à 15 ans puisque le cycle est généralement inférieur à 42 ans. Ce qui m’inquiète encore c’est  l’absence de frappe majeure sur la RD et Porto-Rico depuis 20 ans, puis le nombre d’ouragans qui est remonté vers le Nord près de la Jamaique ou juste au Sud de cette ile (à part Gustave 2008), cela fait près de 30 ans depuis qu’un cyclone n’a incurvé sa trajectoire du Sud-est vers le Nord-ouest sur l’ile et ce genre de trajectoire courant sur la fin des AMO+ constitue le plus gros danger. Imaginez un instant que Mathew était remonté vers le Nord des Cotes-de-fer, Aquin, ou Bainet pour ressortir sur le golfe de la Gonave… cela me donne des frissons.

Êtes-vous au courant de plan d’évacuation pour les régions à risques? D’une nouvelle stratégie pour faire face aux ouragans? D’un programme de reforestation? De recréer la Mangrove près des cotes pour casser l’effet des vagues ( entre autre ) ?  Moi pas, on se chamaille plutôt pour dépenser des millions dans des activités carnavalesques et pourtant des milliers de gens vivent toujours près du rivage, ceux qui n’ont pas été affecté par Mathew (riches ou pauvres) pensent surement que cela ne leur arrivera pas ou  pas avant de nombreuses années.  Bien sur, lorsque cela arrivera ce ne sera pas de notre faute, nous sommes un pauvre petit pays et on va encore une fois accusé les changements climatiques, triste et pathétique.

 

 

Rudolph Homère Victor

Météorologiste

AMS

Mr météo.info tous droits réservés février 2017

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COP21: La banquise de l’Arctique et les glaces du Groenland fonderaient à un rythme effréné.

Alors que la conférence sur le climat touche à sa fin les mensonges et demi vérité sur celui-ci continuent de plus belle avec CNN, le New York Times ou encore  le Guardian par exemple.  L’une des contre-vérités  les plus avancées ces derniers temps est la fonte rapide de la banquise de l’Arctique alors que les mesures satellitaires montrent une croissance rapide de celle-ci la plus rapide peut être depuis l’ère des satellites (1979).

ice 1

Ocean and Ice Services | Danmarks Meteorologiske Institut

La banquise se développe très rapidement dans les mers de Barents et de Kara, et sera probablement proche de la  “normale” dans quelques semaines.

 

Les lignes jaunes indiquent l’étendue de la Banquise à cette période de l’année

normal

N_daily_extent.png (420×500)

Les régions colorées en  verts ci-dessous indiquent là où la glace a cru au cours des deux dernières semaines.

ice jaune

 

Pendant ce temps,  CNN affirme que le Groenland est en train de fondre à -32 °C, et qu’ils peuvent le constater à  des milliers de miles de là.

http://edition.cnn.com/2015/12/08/opinions/sutter-ice-watch-cop21-two-degrees/index.html

cnn

 

-32

summit:status:weather

La surface du Groenland a connu un gain de la glace cet automne de plus de 250 milliards de tonnes de glace et de neige. Cela  représente une moyenne de trois milliards de tonnes de glace par jour. CNN appelle cela « fonte ».

250 milliards de tonnes de glace et de neige de plus pour le Groenland depuis septembre

250 billi

Greenland Ice Sheet Surface Mass Budget: DMI

Les températures à la capitale du Groenland ont été en chute libre depuis 2003, et sont les plus froides depuis l’éruption du  Pinatubo en 1993 qui avait refroidi notre planète .

capital green

 

Ne vous méprenez pas à ce sujet, le changement climatique est peut-être la plus grande fraude de l’histoire.

 

 

Rudolph Homère Victor

Météorologiste 

AMS/OAS

Mr météo.info tout droits réservés decembre 2015